"Un tisserand est un artisan qui tisse divers types de fils pour en faire des étoffes. En tapisserie, le tisserand est un créateur d'oeuvres textiles, tissées, qui en assure lui-même le tissage."
Source Wikipédia cité par Abedennour Bidar dans Les Tisserands.
Pourquoi parler d'altérité et de coopération?
Notre monde inter-relié est complexe. Pour le comprendre et surtout agir ensemble pour préserver notre planète et toutes les espèces vivantes, nous avons besoin de l'énergie de chacun. Nous sommes donc fortement invités à coopérer.
Pourtant, nous ne savons plus très bien comment faire.
Issus d'un monde individualiste, nous avons oublié les clés de la relation.
Et qui dit coopération dit apprendre à composer avec l'autre.
Que vient réveiller l'altérité?
Evoquer l'altérité c'est évidemment se questionner soi-même. Car comment rencontrer l'autre si je me suis perdu à moi-même? Tant que je ne serai pas au clair avec moi-même, en paix avec mon histoire, mes conditionnements, mes comportements réactifs, comment tisser avec autrui?
Ensuite, comment construire une relation durable si je ne réussis pas à accepter l'autre dans son irréductible différence ?
Singularité désirée et tellement dérangeante.
Dans un monde qui s'uniformise, les différences ont du mal à s'exprimer et souvent la violence ou la rupture apportent une réponse radicale à une difficulté relationnelle.
Rompre est plus facile que tisser.
Et pourtant, nous n'aurons guère de futur paisible si nous ne réussissons pas le défi de rencontres en altérités pacifiées.
Une ressource essentielle : un tissage de qualité
Lorsque les relations sont délicates voire bloquées, que les altérités sont dans la phase d'aspérités qui s'entrechoquent, tisser un lien profond de qualité avec autrui conduit à construire un maillage essentiel. La trame de la relation est alors si solide que les désaccords, les conflits, les incompréhensions peuvent être déposés, nommés et dissous.
En fonction de l'ampleur du désaccord, de la divergence, il faut parfois du temps, accepter l'éloignement, comme la tapisserie distendue. Cependant, la clé réside dans le fait de ne jamais lâcher la relation à autrui. Il ou elle est là comme un écho de nous-même, un miroir, parfois inconfortable à regarder et pourtant si nourrissant, capable de voir nos zones d'ombre et de les éclairer grâce à l'interaction.
Oser ce tissage, à l'instar des peuples premiers - au-delà de la pièce artistique - c'est tout le symbolisme des fils entremêlés entre soi et autrui. Et la navette représente la relation.
Quel soin prenons-nous de ce tissage?
Laissons-nous les liens se distendre ou assumons-nous de les rendre solides et durables?
Car c'est cette trame fortement tressée qui permet de se déposer en authenticité, d'accepter les aspérités des différences et de dialoguer les incompréhensions.
Si l'on sait qu'au moindre obstacle, l'autre est là, dans une présence affirmée, soutenante et encourageante, alors nous avons envie de poursuivre l'échange.
Nous osons être qui nous sommes.
Et plus nous déployons notre authenticité, plus nous dévoilons nos vulnérabilités et plus l'autre en face peut nous rencontrer, véritablement, profondément. Alors le lien ténu entre l'autre et moi permet-il, non seulement de coopérer, de se rendre service, et aussi de faire converger nos énergies pour soutenir des projets ambitieux et pérennes.
Osons prendre le risque de nous faire chambouler par l'autre, osons cette magnifique aventure de la rencontre de l'altérité, il y a tant de trésors à découvrir et prenons la mesure des mots que nous utilisons, ils seront le chemin vers le coeur de l'autre, ils seront la "navette" d'un tissage durable. S'engager dans ce chemin des relations pérennes c'est aussi faire écho aux enseignements du vivant qui se déploie pour grandir, vibrer et apporter les ressources de vie à toutes les espèces.
Choisis bien tes mots car ce sont eux qui créent le monde qui t'entoure.
Pensée Navajo
Christine Marsan, 26 novembre 2017.